De col en col jusqu'au lac Sevan
Par Moi le 23 mai 2023, 10h06 - Hayastan - Lien permanent
Je profite d'une pause relax pour réduire le retard que le blog a pris sur moi (et pourtant, je ne roule pas vite...).
Ah, mise à jour encore retardée par une coupure de courant...
Bien que Dilijan soit un peu plus touristique qu' Idjevan, je ne m'y suis pas arrêtée très longtemps. J'y suis arrivée par temps de pluie.
Je me suis réfugiée dans un petit gostevoy dom (gîte chez l'habitant) sympa, chez Lidia. Elle m'a gentiment prêté des pantoufles et proposé un thé bien chaud quand elle m'a vue marcher en chaussettes mouillées dans sa maison.
J'ai passé les 2 averses suivantes au musée d'art et d'archéologie, puis dans un bon petit restaurant où je me suis régalée : truite grillée aux noisettes et à l'estragon avec beurre au citron et épinards frais, et un verre de bon vin blanc de la région, au goût qui rappelle un peu les mtsvane et kvevri géorgiens, miam !
Petite note explicative si vous ne connaissez pas encore les vins du Caucase : en Géorgie, mtsvane est une variété de cépage blanc endémique du Caucase ; et les kvevri, ce sont des vins vinifiés dans des amphores en terre cuite. Les bons blancs vinifiés en amphore ont une couleur légèrement ambrée, et un goût spécial ; au début, ça surprend, mais j'aime bien. Certains kvevri ont une couleur très ambrée et un goût très spécial, produit par l'oxydation dans la terre cuite micro-poreuse, et quelques sels minéraux.
Ensuite, longue montée de Dilijan au col de Sevan (2150m) par temps frais puis humide. Pendant les 2 averses suivantes, j'ai trouvé refuge successivement dans un hôtel avec piscine et sauna, où j'ai aussi profité du sèche-cheveux pour faire sécher ma petite lessive ; puis le lendemain sous un minuscule kiosque où Seda et son mari vendent des épis de maïs bouillis pour arrondir leurs fins de mois de modestes retraités.
J'ai pu profiter de leur installation low-tech pour me réchauffer les pieds : un tuyau branché sur leur vieux 4x4 soviétique alimente leur petit brasero mixte feu de bois + gaz (il y a pas mal de voitures qui roulent au gaz GPL en Arménie).
Et enfin, une belle éclaircie m'a permis de rejoindre le col par l'ancienne route, encore en assez bon état. La route actuelle passe dans un tunnel de 2 km, pas envie de m'y aventurer en tricycle couché !
A partir de Semionovka, le petit village installé au col, le paysage est assez différent.
On arrive sur de hauts plateaux volcaniques vallonnés, et les paturages remplacent la forêt.
De là, on commence à voir le lac Sevan, que j'ai atteint à la nuit tombante.
Là, quelques gars qui attendaient une marshrutka m'ont indiqué un petit hôtel à 2-3 km, et j'ai fini par comprendre que quand ils me disaient "à gauche", c'est qu'il fallait prendre la voie express qui longe la rive ouest du lac à contre-sens, vu que les restaus et hôtels sont quasiment tous côté lac. Ils étaient unanimes : un vélo à contre-sens sur la bande d'arrêt d'urgence, ça ne pose aucun problème, personne ne me dirait rien. Mais je me sentais moyennement à l'aise dans cette situation avec mon petit éclairage sur piles AA à l'arrière et AAA dans ma frontale...
Alors, je me suis arrêtée dès que j'ai pu, dans un minuscule restaurant déjà fermé mais encore animé, où Gevorg et ses 2 cousins terminaient une longue journée de travail : ils construisent des "domiki", des paillottes en bois, pour agrandir le restaurant. C'est dans leur parc tranquille que j'ai pu monter ma tente.
En prime, j'ai été invitée pour le repas préparé par Narineh, la tante de Gevorg : ça m'a donné l'occasion de découvrir une nouvelle plante comestible, appelée khantig en arménien, qui se consomme marinée comme du câpre ou des cornichons, et qui ressemble beaucoup au dzhondzholi géorgien. Quand j'ai demandé le nom russe, ils m'ont dit qu'ils ne savaient pas, le khantig ne pousse pas en Russie.
J'ai ensuite pu m'installer très confortablement, car Gevorg m'a prêté 4 couvertures que j'ai utilisées comme moquette dans ma tente : il avait peur que j'aie froid, la météo annonçait +1°C cette nuit. Je n'ai pas regretté d'avoir emporté le plus épais (enfin, le moins léger) de mes 2 duvets. Seule ombre au tableau de cette nuit : le vent a tourné après l'heure du coucher, et je me suis retrouvée une partie de la nuit sous le vent d'un tas d'ordures qui se consumait lentement mais sûrement. Ca, c'est une plaie en Arménie : les gens brûlent souvent eux-mêmes leurs ordures à ciel ouvert.
Et enfin, le lendemain, une journée complète sans la moindre averse : j'ai pris un petit coup de soleil sur les bras.